jeudi 3 janvier 2013

ORDURES; ET SI L’ETAT ALLAIT LOIN ?



A proximité d’un  ravin, une nuée de mouches sous le regard amusé de hérons,  bourdonne au dessus  d’un amas d’ordure au parfum suffocant. Les dépotoirs sauvages d’ordure  comme celui là,  ont malheureusement foisonné ces dernières années à Abidjan. Ils  sont un vrai mal de vivre pour les populations de la capitale économique. En face, l’état qui sort d’un coma politique  réagit comme il peut, en attendant une solution durable. 

Plusieurs années dans le rétroviseur,  les camions des éboueurs avec leurs sirènes à vous arracher le cœur sillonnaient la ville d’Abidjan dans son moindre  recoin pour débarrasser les ménages des ordures.  De jour comme de nuit, les éboueurs  menaient  une féroce  traque aux ordures.  Malheureusement depuis quelques années, tout ça est devenu  nostalgie. Pis, quelques camions d’éboueurs qu’on entend encore,  sont  d’une rotation irrégulière.  Conséquence,  chaque ménage se débarrasse  comme il peut de ses ordures.  Soit dans la broussaille d’à côté, dans un gouffre  façonné par les eaux de ruissellement,  sur la voie publique… bref, pourvu que les pelures de légumes,  les restes d’aliment  et autres détritus vomis par les ménages  soient loin de vue.  Inutile de rappeler les inconvénients  sanitaires de ces dépotoirs d’ordures qui pullulent ça et là en plein air.  Tout le monde le sait ; ce sont des  tanks de maladies.  La gestion des ordures a toujours donné du fil à retordre à  tous les gouvernements, malgré une volonté toujours affichée, de rendre Abidjan aussi propre qu’une surface glacière.   On se rappelle encore cette image du feu président Robert Guéi pelletant lui et ses hommes, des ordures en pleine gare routière d’Adjamé.

Devant ces dépotoirs sauvages, l’état ivoirien bricole encore  les solutions et peine à trouver la formule juste pour évacuer sans discontinuer, les 4000 tonnes d’ordures produites chaque jour par Abidjan.  Collecter, transporter et mettre en décharge.  C’est ainsi qu’ont toujours œuvré tous  les gouvernants.  Un triptyque qui traine  à son actif  plusieurs palabres d’argent.  Les camions des éboueurs au bout d’un certain temps de rotation marquent le pas, pour  facture impayée. Mais qui refuse donc de payer  la note ? Aller au bout de cette question a toujours été  un vrai casse tête- ivoirien qui conduit à  une véritable passe d’armes entre le ministère en charge de la question, le district d’Abidjan et les communes.  Ensuite,  il-y-a  la grande décharge publique et officielle d’akouédo,  tantôt qui ferme, lorsque le petit village dont elle porte le nom  ne perçoit pas la contrepartie financière de la cohabitation et tout ce qui va avec comme projet de développement.  C’est une méthode surannée qu’il incombe de vite passer.

En juin 2011, la société camerounaise de traitement des ordures ménagères inaugurait sa première centrale de captage de biogaz au dessus de la décharge de Yaoundé. Cela permettra de capter des  gaz à effet de serre monnayables sur le marché des crédits carbones et  à  produire de l’électricité à la longue. Avec ce type d’initiative, les ordures des ménages  deviennent une matière première génératrice de revenus et objet d’une forte demande.  C’est le cas actuel de la Suède, confrontée à une grave pénurie d’ordures pour alimenter ses incinérateurs qui produisent de la chaleur pour le chauffage et de l’électricité. Avant la phase terminale de la crise militaire et politique,  un projet de ce  type conduit par l’Agence de développement des énergies renouvelables en Côte d’Ivoire (ADERCI) était sur la table des décideurs.  Il ambitionnait  produire du méthane à partir de la décharge d’Akouédo et  capter environ 522 329 tonnes de dioxyde  de carbone (CO2) par an, échangeables en coupure de banque sur le marché du crédit carbone. C’est vers ce type de schéma qu’il faut à présent tendre.  Car avec lui, les ordures des ménages deviennent une matière organique indispensable à la production de biogaz.  Le président Alassane Ouattara annonce qu’il ambitionne faire de la Côte D’ivoire à l’horizon 2020 un pays émergent. Convertir  les  ordures  en biogaz,  ne sera qu’une plus-value énergétique  qui permettra d’aller encore vite vers ce cap de développement,  en cette ère où le pétrole fait du zèle.  Espérons que l’appel d’offre pour une gestion intégrée des ordures  qui a fait  gazouiller les médias pour semble t-il certains biais, il y-a peu, soit enfin une solution durable à ces tas d’immondice qu’on côtoie chaque jour. Un volet énergie renouvelable est bel bien présent dans le cahier des charges  du dit appel d’offre. Vivement qu’on y arrive.  Car  « COLLECTER, TRANSPORTER, METTRE EN DECHARGE » sans ambition de transformation, traduit  une certaine cécité technologique antipathique aux objectifs de développement fixés d’ici à 2020.
                                                                                                        Momo Dia

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