GLISSEMENT
DE TERRAIN L’AUTRE FACE MORTELLE DE LA PLUIE
Ca y est ! La
pluie a repris du service au dessus d’Abidjan.
Fine ou abondante, elle tombe sans se fatiguer. Même si cela procure un brin de
plaisir en pensant aux paysans et leurs exploitations agricoles, un hic d’inquiétude demeure tout de même à cause
des populations des bidonvilles dont les habitations sont fixées sur les talus,
au pied des monticules et dans les
ravins. En période de pluie, les glissements de terrain sont légions dans ces
zones là. Ces blocs de terre qui se détachent
à force de bombardement sans relâche de pluies diluviennes sont malheureusement
l’autre face, mais laide de « dame pluie ». Sur les terrains en
pente, les éboulis de terre trimballent en chute libre les habitations et
engloutissent celles situées au pied des élévations de terre. le bilan de ces
accidents de terrain est parfois effroyable lorsque, en plu des dégâts matériels,
des vies humaines s’éteignent sous les décombres des amas de terre, ou sous les
débris des logis de fortune.18 morts en juin 2009, 8 morts en juin 2010, 5
morts en juin 2011, les glissements de terrains réussissent toujours le pari d’engloutir des vies humaines pendant la
saison des pluies. Ces drames se produisent très souvent dans les bidonvilles
d’Attiécoubé, Yopougon, Cocody et Abobo. Pour l’année 2012, la météo annonce
des hauteurs de pluie importantes sur Abidjan. Pour parer au pire, au regard
des drames des années passées, le ministre de la construction et de l’urbanisme
Mamadou Sanogo sillonne les bidonvilles exposés aux glissements de terrain et
autres avatars, pour convaincre ou contraindre les habitants des lieux au
départ. Avec bien sûr dans la mallette, une aide financière de l’état. Chaque ménage
déguerpi recevra la rondelle de 150.000 FCFA pour se recaser. Environ 6000
familles sont concernées par cet altruisme de l’état.
Face aux drames causés
par les glissements de terrain dans plusieurs bidonvilles d’Abidjan en juin
2009, l’ancien commandant des soldats du feu, le tribun colonel Adama Coulibaly,
horrifié par l’ampleur du drame s’indignait : « Les gens
construisent n'importe comment des maisons au bord des précipices, sans
fondation ». Malheureusement ces taudis et ces quartiers précaires qui
sortent spontanément de terre dans ces
zones propices aux glissements de terrain, sont la conséquence de
l’urbanisation sociologique dont Abidjan est victime, conjuguée à une politique
de l’habitat trop défavorable aux ménages pauvres. Les populations s’installent
à Abidjan, non pas parce que un emploi les y appelle, mais parce que vivre dans
une métropole comme Abidjan est synonyme de modernisme et de réussite sociale
(???). Cela crée absolument une pression sur l’habitat. Et quand bien même, certains
de ces hommes et femmes arrivent à trouver un petit boulot avec la rémunération médiocre
qui va avec, la politique de l’habitat qui les a omis dans sa stratégie globale
ne leur permet pas de se loger décemment; si ce n’est dans ces zones de grands dangers.
« Depuis que la SICOGI et la SOGEFIHA ont
arrêté de produire des logements sociaux, conformément à l’ancienne approche,
il n’y a pas eu en direction des ménages ivoiriens, de véritable politique du logement
à caractère social … » souligne le ministre en charge de la promotion du
logement, Mme Kaba Nialé. Que faire alors ? La générosité
du gouvernement en faveur des déguerpis est-elle suffisante pour juguler
définitivement le problème des habitats fixés en zone de terrains glissants ?
En fouillant les archives des
actions gouvernementales, on découvre qu’en 1997, le bidonville « Washington »
situé sous les hauteurs du lycée technique d’Abidjan avait été détruit sur
ordre du gouvernement et ses habitants relogés dans une cité modeste à
l’assainissement acceptable à Biabou dans la commune d’Abobo. Même si, à dire
vrai, « washington » fut déterré parce que trop laid pour bomber le
torse à cet endroit de la ville, n’est ce pas une expérience à exhumer devant la
prolifération des quartiers précaires à Abidjan ? Au gouvernement
d’apprécier. Malheureusement quinze après, « washington » est en train
de renaître de ses cendres au pied du lycée technique d’Abidjan. Preuve que,
aussi longtemps qu’il n’existera pas d’habitats à portée de main pour les ménages
pauvres, les bidonvilles sortirons de terre là où malheureusement, la mort rode
en période de pluie.
Momo Dia
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